L’enluminure, cet art ancestral qui donne vie aux lettres et aux ornements des manuscrits, fascine encore aujourd’hui par sa richesse et sa minutie. Transmettre cette tradition aux plus jeunes est un défi qui me tient à cœur et que j’ai relevé ces dernières semaines lors d’ateliers hebdomadaires avec des classes de CP et CE1. Pendant six vendredis consécutifs, j’ai initié ces enfants à l’enluminure et à la calligraphie, mêlant découverte historique et expérimentation artistique. Voici un retour d’expérience sur ces ateliers.

De la première séance théorique aux moments de pratique où l’encre et les pigments ont pris vie sous leurs doigts, chaque étape de cet apprentissage a été une aventure. Entre émerveillement, concentration et créativité, ces ateliers ont été une expérience enrichissante, tant pour les enfants que pour moi. Je vous propose donc de revivre cette belle transmission, en partageant le déroulé de nos séances, les découvertes des élèves et les enseignements que j’en retire en tant qu’animatrice.
Objectif des ateliers
J’ai animé ces ateliers à la demande d’un groupe d’institutrices exerçant dans une école de La Rochelle. Le but était de créer un lien avec le programme scolaire de leurs classes, qui aborde le Moyen-Âge.
Nous avons donc échangé pour trouver des ateliers adaptés, permettant aux enfants d’en apprendre plus sur cette période, mais également de pratiquer eux-mêmes l’enluminure et la calligraphie. Nous nous sommes arrêtées sur la confection de cartes.
La première, une carte sur laquelle ils calligraphieraient “Il était une fois” et peindraient un dragon. La seconde, une carte de vœux.
Déroulé des ateliers
La première séance était consacrée à une introduction théorique lors de laquelle j’ai présenté aux enfants les métiers qui entrent en scène lors de la production d’un manuscrit : calligraphe, enlumineur. Je leur ai ainsi présenté les objets que j’utilise lors de mon travail, comme les outils historiques comme le parchemin ou la plume d’oiseau. Mais également les objets plus modernes, comme la plume calligraphique en métal ou le papier. Je leur ai aussi montré quelques travaux que j’avais réalisés.
Les deux séances suivantes étaient consacrées à la calligraphie. Lors de la première, je leur ai appris les minuscules nécessaires à la rédaction des mots “Il était une fois”. Lors de la seconde, nous avons repris ces lettres, avons formé les mots, et après un peu d’entraînement, les enfants sont passés au propre.
La séance suivante était consacrée à la peinture. Ensemble, nous avons observé les couleurs primaires et étudié les différents mélanges pour obtenir les couleurs secondaires. Puis, je leur ai fourni un modèle pour qu’ils aient une idée du résultat final de la carte qu’ils devaient réaliser. Enfin, ils ont peint le dragon que j’avais créé pour eux en m’inspirant de différents bestiaires.
Je leur ai laissé le choix des couleurs pour laisser libre cours à leur créativité, en les limitant tout de même à trois couleurs maximum.
Les deux dernières séances étaient consacrées à la réalisation de la carte de vœux. Le temps pour cet atelier étant plus limité que celui pour le dragon, j’ai privilégié cette fois-ci la calligraphie. Lors de la première séance, j’ai appris aux enfants quelques majuscules, dont celles nécessaires à la rédaction des mots “Bonne Fête Papa/Maman” et lors de la séance suivante, nous avons repris les minuscules déjà apprises, puis ils ont calligraphié les mots sur leur carte.
Ce que les enfants ont appris
Tout d’abord, ils ont pu apprendre ce qu’étaient l’enluminure et la calligraphie, mais surtout, mettre des mots sur ces deux techniques.
En effet, la plupart des enfants sont déjà familiarisés avec l’enluminure et la calligraphie, sans le savoir forcément, grâce à la culture populaire. Quand on parle de sorcière, immédiatement, on l’imagine avec un grimoire rempli de formules magiques. De même, ils savent sans vraiment savoir ce qu’est le parchemin, et le fait qu’on utilisait des plumes d’oiseau pour écrire.
Maintenant, ils savent que non, on n’utilisait pas des plumes d’aigle, mais des plumes d’oie, et que les plumes de pigeon sont trop petites pour écrire correctement avec.
D’un point de vue plus technique, la calligraphie (plus que l’enluminure, je dois bien l’avouer), leur a permis de se poser, d’apprendre la patience et de travailler leur motricité fine. Plusieurs fois, les enseignantes m’ont confié à quel point elles étaient agréablement surprises de voir l’application que certains de leurs élèves mettaient dans leur calligraphie.
Mon retour d’expérience
Pour ma part, travailler avec ces classes m’a permis de relever plusieurs défis de taille.
Le premier, l’âge des participants. En effet, je n’avais encore jamais travaillé avec des enfants si jeunes. Lors des ateliers que j’animais quand j’étais encore à Angers, les enfants étaient en CM1/CM2. Ils étaient donc beaucoup plus autonomes et précis dans leurs gestes. Ici, les enfants de la classe de CP apprennaient tout juste à écrire. Il a donc fallu que j’adapte mon discours, mais aussi la gestuelle dans mes démonstrations, pour ne pas trop les dépayser.
Le deuxième, le nombre d’élèves. Car encore une fois, je n’avais encore jamais travaillé avec un nombre d’élèves aussi élevé en une seule fois. Pour continuer la comparaison, à Angers, j’avais affaire à des demi-classes, donc 15 élèves maximum. Là, j’avais des classes entières, soit 28 élèves maximum, ce qui représente tout de même du monde à cadrer, mais aussi pas mal de manutention en coulisses.
Quoi qu’il en soit, j’aime toujours autant ce genre d’ateliers, car voir la curiosité et l’émerveillement des élèves est pour moi la plus belle des récompenses. Ce que j’aime le plus, c’est de voir la manière dont ils se réapproprient les consignes que je leur donne. Parfois, cela peut donner des résultats discutables, mais le plus souvent, ils parviennent à me surprendre par leur inventivité. Cela leur permet également d’apprendre à observer, à faire des choix et à assumer ces choix, même s’il ne s’agit que d’écriture et de couleurs.
A retenir
Globalement, je dirai donc qu’une fois de plus, ces ateliers ont été une expérience enrichissante. Même si les défis à relever étaient de taille et m’ont parfois paru insurmontables (notamment en ce qui concerne la peinture), je suis fière de ce que j’ai pu transmettre à ces enfants. C’est en grande partie pour ça que j’ai choisi d’exercer ce métier : pour transmettre notre patrimoine aux futures générations, pour montrer aux enfants qu’il existe autre chose que les écrans.
Mais surtout, je suis fière de ce qu’ils ont réussi à faire en si peu de temps ! Je remercie donc cette équipe pédagogique de m’avoir fait confiance, en espérant que l’expérience aura été aussi enrichissante pour elle que pour moi.
J’espère en tout cas que ce retour d’expérience vous aura plus. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à les laisser en commentaire. Sur ce, je vous dit à très bientôt !